L’avenir de l’économie afghane sous le gouvernement taliban

De nouveaux défis attendent l’économie afghane fortement ébranlée par plus d’un demi-siècle de guerres.

Jusque-là, l’histoire des peuples n’a jamais démontré l’efficacité d’un groupe armé à gérer l’économie d’un Etat dans l’intérêt de ses citoyens. Les pays qui dépendent des aides et des subventions internationales font régulièrement face à des jours difficiles. En ce qui concerne l’Afghanistan, l’administration américaine vient de geler 9,5 milliards de dollars des actifs de la Banque centrale afghane et de suspendre les transferts d’argent liquide vers le pays.

Les gouvernements européens ont également interrompu leur aide au développement de l’Afghanistan. Le Fonds monétaire international a suspendu l’accès aux droits de retraits spéciaux, et les gouvernements occidentaux, les associations et les donateurs imposeront des conditions strictes à la reprise des subvenions. Ces aides dépendront du maintien de certaines libertés par les talibans en particulier vis à vis des femmes, et du respect de leur engagement à empêcher la réapparition de groupes terroristes comme al-Qaida et Daech et à ne pas bafouer les droits de l’homme et les libertés.

Après la formation du récent gouvernement taliban, les craintes d’assister à un effondrement total de l’économie afghane se sont accrues, le mouvement ayant monopolisé tous les postes du gouvernement et exclu de l’équation toute source de diversité alors que la situation économique nécessite des programmes de réformes et de structuration dans chaque secteur afin qu’elle puisse se remettre des impacts de la guerre.

Les investisseurs occidentaux attendent également l’autorisation de leurs gouvernements, et celle-ci prendra en compte l’opinion publique des pays concernés, car la plupart des entreprises américaines et européennes sont conscientes des réactions que peuvent déclencher des négociations, directes ou indirectes, avec les talibans.

A l’heure où les pays occidentaux menacent de ne pas traiter avec les talibans au pouvoir, la Chine, la Russie et le Pakistan se bousculent pour lancer des affaires avec les nouveaux dirigeants, ce qui rend la position des États-Unis et de l’Europe plus critique sur la scène internationale dans le contexte de la chute de l’Afghanistan.

Les données officielles des Nations Unies indiquent que la balance commerciale afghane souffre d’un déficit s’élevant à environ 4,66 milliards de dollars pour la seule année écoulée, qu’elle représente 30 % du produit intérieur brut et qu’elle est entièrement financée par des dons désormais non sécurisés. Les pays donateurs avaient alloué à l’Afghanistan 20 milliards de dollars entre 2021 et 2025, mais avec le retour des talibans le l’avenir du pays est incertain.

Une récente étude publiée par l’ONU a indique que la moitié de la société afghane vit en dessous du seuil de pauvreté, que le taux de chômage est supérieur à 40 % et qu’environ la moitié de la population afghane est employée dans le secteur agricole.

La communauté internationale craint que l’Afghanistan ne se tourne vers le développement de la culture de l’opium, qui est actuellement en tête avec une production qui dépasse celle de tous les autres pays réunis, puisqu’il produit annuellement plus de 9 000 tonnes, et la superficie des cultures de pavot est passée à 328 1 000 hectares, tandis que le nombre de provinces afghanes qui en sont dépourvues n’est que de 10 à 13.

La Central Intelligence Agency a confirmé l’implication des talibans dans le commerce de l’opium, et les derniers chiffres disponibles révèlent que l’industrie de l’opium en 2019 a réalisé des gains compris entre 1,2 et 2,1 milliards de dollars, dépassant la valeur des exportations légales du pays.

L’Afghanistan occupe la 173e place dans le classement des économies mondiales, sur un total de 190 pays, et la situation générale a sensiblement été aggravée par l’épidémie du Coronavirus.

Paradoxalement, l’Afghanistan possède une grande richesse naturelle sous forme de gisements minéraux en quantités énormes dont la valeur dépasse un billion de dollars, ce est suffisant pour modifier fondamentalement le visage de l’économie afghane. Mais le progrès requiert de la stabilité et un système capable de gérer les ressources et d’attirer les investissements étrangers, ce qui n’est pas le cas du régime taliban qui avait déjà échoué à exploiter ces richesses lorsqu’il était au pouvoir 1996 à 2001.

Le Fonds monétaire international a également mis en garde contre les effets de l’instabilité et du contrôle des talibans sur les villes et les institutions du du pays, qui pourraient conduire à la dilapidation de tout le potentiel économique disponible en Afghanistan.

Le Fonds monétaire international s’attend à ce que les capacités des institutions étatiques à fournir les services éducatifs, sanitaires et logistiques à la population, s’effondrent en moins d’un an sous le contrôle du mouvement.

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