Des cargaisons d’armes livrées par l’Iran aux rebelles Houthis depuis 2009

Douze années sont passées entre la saisie du premier navire d’armes iraniennes de contrebande destinées aux Houthis et la saisie du dernier en date il y a quelques jours dans les eaux de la mer d’Oman. Entre les deux, de nombreuses opérations non contrôlées ou non découvertes ont eu lieu, comme l’envoi de milliers de miliciens en Iran et au Liban pour les entrainements au combat et les formations d’assemblage d’armes, ainsi que la plantation de cellules d’espionnage pour le compte des gardiens de la révolution iranienne par le biais d’éléments entrés au Yémen en tant que commerçants.

Des sources ayant travaillé dans les services yéménites du renseignement accusent Téhéran d’exploiter l’instabilité politique et sécuritaire dont le Yémen souffre depuis 2011 pour multiplier les envois d’armes aux Houthis dans le gouvernorat de Hajjah (nord-ouest du pays), à travers les côtes et les îles de la mer Rouge.

En 2009, les autorités yéménites ont annoncé la saisie de la première cargaison d’armes iraniennes de contrebande sur les côtes de la mer Rouge, sans révéler de détails supplémentaires, mais les informations disponibles sur cette période ont montré qu’après cette expédition, les Houthis ont pu faire passer de grandes quantités d’armes à travers les côtes du gouvernorat de Hajjah, en particulier au début de la crise politique qui a frappé le Yémen en 2011, lorsque les milices et leurs partisans se sont mis à acheter de vastes superficies de terres dans la région côtière et les grandes fermes qui s’y trouvent.

Pendant que le gouvernement et l’opposition yéménite s’adonnaient à leur lutte de pouvoir à Sanaa et dans les principales villes, la milice houthie a réussi à contrôler tous les camps du gouvernorat de Saada et à accroitre ses opérations de contrebande d’armes comme jamais auparavant, à travers les petites îles éparpillées sur les côtes yéménites où les navires iraniens déchargeaient les armes tandis que les Houthis les transportaient vers les rives de Midi (nord-ouest) à bord de bateaux de pêche.

Un ancien officier yéménite du renseignement a déclaré dans un entretien avec le journal Asharq al-Awsat: “Les conflits entre les composants du gouvernement à Sanaa ont fait relâcher l’emprise du régime sur les zones côtières. Les houthis qui savaient très bien ce qui s’y passait grâce à leurs membres présents dans l’armée et les services de renseignement, ont stocké dans la région de Midi de grandes quantités d’armes de haute qualité qu’ils ont ensuite facilement transféré à Saada, devenu leur fief.”

Ces opérations se sont poursuivies jusqu’au transfert du pouvoir au président actuel, Abd Rabbu Mansour Hadi. Par la suite, plus exactement le 7 mars 2013, les autorités ont annoncé qu’un nouveau navire iranien chargé d’armes de contrebande appelé “Jehan 2” avait tenté d’entrer sur le territoire yéménite.

Une déclaration du ministère de l’Intérieur de l’époque a indiqué que le navire avait été saisi sur l’île yéménite de Sawabaa, près de Bab al-Mandab, après avoir déchargé une cargaison d’armes sur un bateau de pêche yéménite, précisant que la saisie du navire a été effectuée dans le cadre d’une opération à laquelle ont participé les bateaux de police de la Marine, de la Défense côtière et de la Garde côtière.

Le 23 janvier, les autorités ont arrêté le navire iranien “Jehan 1” qui se rendait au port de Midi contrôlé par les Houthis, et qui transportait des armes “dangereuses” destinées à la milice yéménite, notamment des missiles antiaériens modernes et des matériaux hautement explosifs. En tout, le navire transportait 48 tonnes d’explosifs et d’armes dont des missiles antiaériens “SAM-2” et “SAM-3”.

L’équipage du navire a été déféré au tribunal pénal de Aden spécialisé dans le terrorisme et les questions relatives à la sécurité de l’État, mais le navire a réussi à s’échapper du port et les autorités n’ont pas fourni d’explication à ce sujet. Le tribunal a prononcé une sentence de 10 ans d’emprisonnement contre le principal accusé et fugitif, Hamid Dahash. Il a également condamné les accusés Abdul Aziz Mahrous, Salah Mahdi et Muhammad Kembet à 6 ans de prison, et le suspect Abdul Malik Al-Mashouli à 3 ans de prison.

Les armes ont été confisquées au profit du ministère de la Défense et le navire “Jehan” ainsi que les sommes saisies (d’un montant de 30 000 dollars) au profit du Trésor public. D’autres accusés dans cette affaire ont été condamnés à 1 an de prison avant que la milice houthie ne prenne d’assaut Sanaa et relâche les prisonniers ainsi que deux iraniens accusés de travailler pour une cellule appartenant aux gardiens de la révolution.

En mai 2015, à la suite d’une enquête menée après l’enlèvement du navire iranien “Jehan” par les autorités yéménites en 2013, un rapport confidentiel d’experts des Nations Unies soumis au Conseil de sécurité a indiqué que l’Iran fournissait des armes aux Houthis depuis au moins 2009, que “cette cargaison avait été précédé par d’autres opérations d’armement au Yémen datant de 2009”, et que “le soutien militaire actuel de l’Iran aux Houthis a été prouvé par des transferts d’armes sur une période d’au moins 5 ans.” Outre “Jehan”, les experts ont identifié 5 trajets au cours desquels des navires iraniens avaient transporté des armes vers le Yémen.

Selon des responsables yéménites, avant le début de l’opération “tempête décisive” lancée en 2015, l’Iran était en mesure de transférer quotidiennement des armes de Téhéran à Sanaa par le biais du transport aérien, grâce à un accord conclu avec les autorités des milices quelques jours après le coup d’État. Les responsables affirment également qu’avec la complicité des parties régionales, la milice a profité des vols que la coalition permettait d’effectuer entre certains aéroports et l’aéroport de Sanaa, pour transporter des quantités de missiles “SAM” et de missiles thermiques, ainsi que de grosses sommes d’argent.

Quelques exemples de saisies d’armes iraniennes

Entre septembre 2015 et mars 2016, la marine américaine a mené 4 opérations d’interception contre des navires iraniens chargés d’armes destinées aux Houthis.

En octobre 2017, le gouvernement yéménite a annoncé la saisie d’un navire de contrebande iranien transportant 29 marins après avoir pénétré dans les eaux yéménites à l’ouest de l’archipel de l’île de Socotra dans l’océan Indien. Un communiqué du gouvernement a indiqué qu’une enquête étaient en cours auprès des membres de l’équipage pour découvrir leurs sources d’approvisionnement.

En décembre 2019, des responsables américains ont déclaré la saisie par la marine américaine d’une “grande cargaison” de pièces détachées de missiles soupçonnées d’être iraniennes, en route vers les Houthis au Yémen.

En février 2020, le commandement central américain a déclaré que le navire saisi dans la mer d’Oman était “iranien” et contenait 150 missiles antichars (Dahlawi) et 3 missiles sol-air. En avril de la même année, les forces navales de la coalition ont réussi à contrecarrer une cargaison d’armes iraniennes au large des côtes yéménites, qui était en route pour livrer la milice houthie.

Le 8 mai 2021, la marine américaine a saisi un navire transportant des milliers d’armes, dont des missiles antiblindés portables et thermiques et des fusils modernes. Les autorités américaines ont déclaré que le dernier endroit où le navire était passé avant son inspection était les ports iraniens.

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