Turquie : Répression des manifestations étudiantes et nouveau procès contre le représentant de “Reporters sans frontières”

La Turquie a rejeté les critiques américaines et internationales concernant son approche violente des manifestations étudiantes de l’université “Bogazici” d’Istanbul. Les étudiants avaient protesté contre la nomination il y a un mois du Dr Melih Polo, membre du Parti de la justice et du développement au pouvoir, en tant président de l’Université, et refusent tout autre président désigné en dehors du cadre universitaire. Entre-temps, débute le procès du représentant de Reporters sans frontières en Turquie et d’autres personnes pour des accusations infondées liées au terrorisme.

Le ministère turc des Affaires étrangères a déclaré que “aucun parti n’est autorisé à s’immiscer dans ses affaires internes, et que les droits à la liberté d’expression, aux rassemblements et aux manifestations sont garantis selon la constitution du pays”. Le ministère a ajouté jeudi dans un communiqué, que les forces de sécurité continueront à exercer leurs fonctions et responsabilités conformément aux pouvoirs qui leur sont accordés par la loi.

Le communiqué a ajouté que “les tentatives d’infiltration et d’incitation à la révolte venant de personnes extérieures à l’université et liées à une organisation terroriste, ont été dénoncées, et que les mesures appropriées ont été prises dans le cadre des lois contre les actions illégales qui outrepassent le droit de protester”.

Mercredi, les États-Unis ont exprimé leur inquiétude concernant les arrestations d’étudiants et d’autres manifestants pacifiques de l’Université de Bogazici. Le porte-parole du département d’État, Ned Price, a déclaré lors d’une conférence de presse: “Nous suivons de près les manifestations pacifiques contre la nomination d’un nouveau président à l’université de Bogazici. Nous sommes préoccupés par l’arrestation d’étudiants et d’autres manifestants”. Le ministère turc des Affaires étrangères a répondu dans une déclaration : “Ceux qui ignorent tout des événements en cours à l’université et de la gestion de ces événements par la Turquie dans le cadre du droit, et donnent à la Turquie des leçons de démocratie et d’État de droit, nous leur conseillons de se regarder dans le miroir. Aucun parti n’a le droit de s’immiscer dans nos affaires internes.”

Selon ce communiqué, la Turquie a démontré à travers ses réformes la garantie de la protection des droits et libertés fondamentales, et qu’elle est déterminée à poursuivre sa lutte contre les violations des organisations terroristes et des cellules qui leur sont associées.

Jeudi sur Twitter, le ministre turc de l’Intérieur, Suleiman Soylu, a mis en garde les étudiants et professeurs de l’Université de Bogazici qui protestent contre la nomination de Melih Polo à la présidence en déclarant : “Ne testez pas l’endurance de notre État”, et les a comparés à des terroristes qui incitent la foule à la rébellion. Un porte-parole du ministère de l’Intérieur a annoncé que 528 personnes ont été arrêtées lors des manifestations universitaires. Des enquêtes sont toujours en cours pour 28 d’entre eux.

En parallèle, le nouveau procès du représentant de Reporters sans frontières en Turquie et d’autres défenseurs des droits de l’homme accusés de “propagande terroriste”, a commencé hier à Istanbul. Le représentant de Reporters sans frontières, Ayrol Ondaroglu, risque une peine de 14 ans de prison pour avoir participé à une campagne de solidarité avec le quotidien Özgur Gundam, clôturé en 2016 pour association avec les travailleurs du Kurdistan, un parti classé organisation terroriste, et avec l’écrivain journaliste Ahmet Nesin et la présidente de la Fondation turque des droits de l’homme, Shabnam Kuru Vinangji.

Les trois activistes sont à nouveau poursuivis pour “incitation au crime”. Ils avaient été acquittés en 2019 après un long procès lié à la même affaire, mais une cour d’appel a annulé la décision l’an dernier, ce qui a conduit à l’ouverture d’un nouveau procès. Selon un tweet publié par Ondaroglu, après une courte audience au Palais de Justice de Caglayan à Istanbul, le tribunal a décidé jeudi de reporter l’audience au 6 mai. Ondaroglu confirme dans son message son rejet des accusations “ridicules” portées contre lui, affirmant que le procès en cours visait à intimider les médias et la société civile.

“Ce procès est comme l’épée da Damoclès au-dessus de nos têtes”, a déclaré Androglu, 51 ans, apprécié pour ses nombreuses activités dans la défense de la liberté des médias turcs, dans des conditions de plus en plus difficiles. L’arrestation et les poursuites judiciaires contre lui de juin 2016 avaient déclenché des manifestations en Turquie et à l’étranger. Il y a quelques jours, 17 organisations concernées par la liberté de la presse, dont “Reporters sans frontières”, ont appelé les autorités turques à abandonner les accusations, dénonçant un “harcèlement judiciaire”.

La Turquie occupe la 154e place sur 180 pays en 2020 dans le classement de la liberté de la presse publié par Reporters sans frontières.

Related articles

LEAVE A REPLY

Please enter your comment!
Please enter your name here