Le diplomate iranien Asadullah Asadi condamné à 20 ans de prison par un tribunal belge pour un projet d’attentat en France

Un tribunal belge a jugé le diplomate iranien Asadullah Asadi coupable d’avoir dirigé une cellule terroriste et d’avoir planifié un attentat en 2018 contre les membres d’une conférence de l’opposition iranienne à Villepinte, dans la banlieue parisienne. Il est condamné à la peine maximale de 20 ans d’emprisonnement.

Asadullah Asadi, 49 ans, était le troisième consul de l’ambassade d’Iran à Vienne. C’est la première fois que l’Europe poursuit un responsable iranien pour des opérations terroristes sur son sol. Bien que le tribunal ait confirmé l’implication des services de renseignement iraniens dans la cellule terroriste, il a déclaré que sa compétence se limitait à juger la cellule et non le régime iranien.

En commentaire, le procureur Georges-Henri Pottier a déclaré : “Deux choses apparaissent : la première est que les diplomates ne bénéficient pas de l’immunité pour les actes criminels, et l’autre confirme la responsabilité de l’Etat iranien dans ce qui aurait pu être un massacre.”

L’opposition iranienne a qualifié cette décision “d’historique”. Shaheen Abadi du Conseil national de la résistance a déclaré à sa sortie du tribunal que “le verdict a clairement montré que le régime iranien est responsable de l’opération”, ajoutant : “Il est clair que le régime iranien utilise le terrorisme d’État…Il est temps pour les pays européens d’inviter les ambassadeurs iraniens à fermer les ambassades, parce que le procès a démontré que le régime iranien les utilise pour se préparer aux opérations terroristes, ce qu’il a réussi à faire grâce à une approche douce des pays européens.”

Outre Asadi, le tribunal a infligé des peines de prison à 3 agents de nationalité belge et d’origine iranienne, qui avaient prévu avec Asadi de faire sauter la conférence de l’opposition à Villepinte. Selon l’acte d’accusation, l’enquête a révélé que Asadi était un agent de renseignement iranien qui “travaille sous couvert diplomatique”, et qu’il a coordonné ce plan terroriste en comptant sur trois complices, un couple résidant à Anvers, et un ancien dissident iranien, un poète résidant en Europe.

Un tribunal anversois a condamné Nassima Naami à 18 ans de prison, son mari Amir Saadouni à 15 ans, et le troisième assistant Mehrdad Arifani à 17 ans, en plus de les avoir déchus de leur nationalité belge.

Asadi n’a pas assisté à l’audience du verdict ni aux séances préliminaires, préférant rester dans sa cellule. Il a refusé de comparaître car selon son avocat, “il ne reconnaît pas son procès” et en tant que diplomate, il jouit d’une immunité censée le protéger du procès. Le juge a rejeté cette défense et a déclaré que son immunité était limitée au pays dans lequel il travaille, qui est l’Autriche. Lors de son arrestation, il se trouvait en Allemagne et n’était pas en mission diplomatique, ce qui signifie que son immunité n’était pas valide au moment des faits.

Dans sa lecture du verdict, le juge a déclaré “qu’il est certain que les ordres ont été reçus de Téhéran et que l’argent qu’il a versé aux époux Naami et à Saadouni n’est pas son argent personnel”. Malgré une condamnation claire du régime iranien, le juge a précisé que la compétence de la cour se limitait à juger la cellule terroriste.

Le juge a décrit la bombe qui a été saisie au couple quelques heures avant son explosion, comme “très puissante”, indiquant qu’elle aurait fait de nombreuses victimes. Les enquêteurs ont affirmé que la bombe a été fabriquée avec un haut niveau de professionnalisme, tandis que le parquet a confirmé qu’Asadi l’avait apportée avec lui dans sa valise diplomatique de Téhéran dans un avion commercial, et l’avait livrée au couple dans un restaurant “Pizza Hut” du Luxembourg un jour avant la date prévue de l’opération. Le juge a donc rejeté la défense du couple selon laquelle ils n’étaient pas conscients que la bombe était réelle et causerait des dommages.

Les trois complices ont accepté de coopérer avec les enquêteurs mais Asadi a refusé de parler, sauf une fois où il a demandé à s’entretenir avec la personne en charge de l’enquête afin de lui adresser “des menaces”, selon le rapport des enquêteurs qui lui ont parlé. Asadi a prévenu les enquêteurs qu’il existe de nombreux groupes armés dans la région du Moyen-Orient, notamment au Liban, en Syrie, en Irak et au Yémen, qui sont très “intéressés par l’issue de son procès” et qui pourraient “agir” si le verdict émis par le juge n’est pas en sa faveur.

Téhéran rejette les accusations portées contre Asadi et affirme que ses droits et son immunité en tant que diplomate ont été violés. L’année dernière, Asadi a rendu visite en prison à une importante délégation officielle iranienne qui comptait plus de 30 fonctionnaires, dont 5 venus de Téhéran et qui se sont présentés comme travaillant au ministère iranien des Affaires étrangères. Cependant, la police belge a écrit dans un rapport sur ces visiteurs une note indiquant qu’elle ne pouvait pas vérifier ces informations. Plus tard, l’opposition iranienne a déclaré qu’il s’agissait de fonctionnaires du ministère iranien du renseignement et de la sécurité et non du ministère des Affaires étrangères.

Le tribunal a accordé à Asadi et aux trois autres condamnés 4 mois pour faire appel de la décision.

Parallèlement, les autorités allemandes enquêtent sur des soupçons concernant la gestion par Asadi d’un vaste réseau d’espionnage en Europe et en particulier en Allemagne. Ces accusations sont basées sur des preuves que la police allemande a trouvées dans sa voiture le jour de son arrestation dans l’État de Bavière en 2018, avant qu’il ne soit remis à la Belgique. Parmi ces preuves, un livret contenant 300 adresses environ, réparties dans 11 pays européens dont la plupart se trouvent en Allemagne. Cela a conduit les enquêteurs allemands à soupçonner que ces adresses accompagnées de dates étaient les lieux et les heures de ses rdv avec des agents iraniens en Europe. Les enquêteurs pensent qu’il dirigeait ce réseau pour le ministère iranien des renseignements.

En plus de ces adresses, la police a trouvé dans sa voiture des reçus de sommes d’argent versées à des personnes dont seuls les prénoms étaient écrits, et un autre livret contenant des mots de passe et des détails techniques de l’assemblage de la bombe. Il semblait contenir les instructions qui accompagnaient la bombe qu’il a remis au couple, trois jours avant son arrestation.

La chasse à cette cellule terroriste a commencé lorsque les polices allemande, française et belge ont été informées de la collaboration du couple avec Asadi pour commettre un attentat à la bombe.

L’attentat du 30 juin 2018 à Villepinte, près de Paris, était supposé viser le grand rassemblement annuel du Conseil national de la résistance iranienne, une coalition d’opposants qui compte dans ses rangs le mouvement “Jihad Khalq”.

Le même jour, la police belge a arrêté un couple belge d’origine iranienne vivant à Anvers près de Bruxelles, avec 500 grammes de peroxyde d’acétone explosif et un pistolet paralysant dans leur voiture.

Asadi a été arrêté le 1er juillet en Allemagne. Des photos ont été présentées le montrant le 28 juin au Luxembourg livrant un colis contenant la bombe au couple belgo-iranien. Le diplomate a été remis en Belgique en octobre 2018.

Cette arrestation a eu lieu au dernier moment et l’opposition a réussi à organiser sa conférence à laquelle ont participé des milliers d’iraniens et de responsables occidentaux dont Rudy Giuliani, l’avocat de l’ancien président américain Donald Trump, et la Franco-Colombienne Ingrid Betancourt, autrefois otage des Forces armées révolutionnaires de Colombie (FARC).

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