La COP28 peut-elle parvenir à une action décisive ?

Le 20 mars, le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) a publié son rapport de synthèse, un résumé de sept années de science climatique, qui souligne une fois de plus la grave menace que le changement climatique fait peser sur l’humanité.

La conclusion du rapport indique que même avec les réductions d’émissions de gaz à effet de serre les plus ambitieuses, le réchauffement climatique devrait dépasser la limite de 1,5 degré Celsius, fixée par l’Accord de Paris, dès 2030. La hausse des températures devrait atteindre 1,6 °C, avant de redescendre sous le seuil critique. Pour que ce résultat “optimal” soit atteint, les émissions mondiales doivent atteindre leur maximum d’ici 2025, chuter d’au moins 43 % d’ici 2030 et atteindre un niveau net de zéro carbone d’ici 2050.

Pourtant, nous ne pouvons pas atteindre cet objectif avec les politiques actuelles mises en place aux niveaux national et international. En réalité, si nous ne changeons pas radicalement notre approche de la crise climatique, nous sommes sur la bonne voie pour une augmentation de 2,8 °C d’ici la fin du siècle. Sur cette voie, nous assisterons non seulement à une augmentation de la fréquence et de la gravité des vagues de canicule, des sécheresses et d’autres phénomènes météorologiques extrêmes, mais nous risquons également de subir un dangereux emballement du changement climatique.

Pour éviter le chaos climatique, le monde doit d’urgence intensifier l’action en faveur du climat. La 28e conférence des parties des Nations unies (COP28), qui se tiendra à Dubaï en décembre, offre peut-être l’une des dernières occasions de le faire.

Plusieurs questions sont à l’ordre du jour de ce sommet de deux semaines, notamment l’examen de l’Accord de Paris, un accord sur un objectif mondial pour l’adaptation au climat et la mise en place d’une facilité de financement pour les pertes et dommages engendrés par le changement climatique. Mais la COP28 a le potentiel de réaliser encore plus que cela ; elle peut devenir un tournant où les réunions de la COP passent de négociations multilatérales à une prise de décision audacieuse pour faire avancer l’action climatique.

Cette promesse ne pourra être tenue que si la COP28 évite de s’enliser dans un débat sur le rôle des combustibles fossiles dans la transition énergétique mondiale qui conduirait à une nouvelle impasse sur l’élimination progressive.

En tant qu’hôte de la COP28, les Émirats arabes unis peuvent jouer un rôle majeur en orientant les résultats de la conférence vers une percée qui ouvrira une nouvelle voie.

Certains se sont demandé si un grand exportateur de pétrole pouvait montrer la voie dans les négociations sur le climat avec l’urgence qu’elles nécessitent. Un rapide coup d’œil sur les politiques climatiques des Émirats arabes unis peut peut-être apporter plus de contexte et de visibilité.

Les Émirats arabes unis ont adopté une approche peu orthodoxe consistant à décarboniser et à diversifier leur économie tout en exportant chaque goutte de pétrole qu’ils peuvent. Ils ont également cherché à orienter leur bouquet énergétique national vers les sources d’énergie renouvelables et nucléaires, ce qui permet commodément de libérer davantage de pétrole pour l’exportation. Les recettes d’exportation doivent à leur tour servir à financer la transition économique, notamment en investissant dans des projets d’énergie renouvelable dans le monde entier.

Les Émirats arabes unis visent volontairement la neutralité carbone d’ici 2050. Pourtant, parallèlement, sa compagnie pétrolière nationale Abu Dhabi (ADNOC) s’efforce d’augmenter sa capacité de production de 19 % supplémentaires d’ici à 2027. Elle affirme qu’elle devrait être l’un des derniers producteurs, car sa production a l’un des coûts et l’une des empreintes carbone les plus faibles.

La reconnaissance par la CCNUCC des différentes responsabilités nationales en matière de changement climatique et des capacités d’action permet aux pays en développement de prendre des engagements modestes en matière de réduction des émissions, dans la mesure ou leur besoin de développement économique est encore important. Le fait que les Émirats arabes unis soient un grand producteur de pétrole ne change pas grand-chose, car les combustibles fossiles sont considérés comme des biens commerciaux et leurs émissions sont comptabilisées là où ils sont brûlés.

À l’approche de leur présidence de la COP, les Émirats arabes unis peuvent toutefois aller au-delà de leurs responsabilités en tant que signataires de la CCNUCC et démontrer qu’ils sont des pionniers en matière de climat. La mise en œuvre des objectifs de l’Accord de Paris nécessite un leadership qui s’attaque aux défis de façon impartiale et réalise des percées pour débloquer l’action climatique.

Les EAU peuvent et doivent utiliser leur diplomatie croissante et leur puissance financière pour stimuler la décarbonisation et renforcer les objectifs de réduction des émissions à l’échelle mondiale avant le sommet. Ils peuvent également tirer parti de leur influence au Moyen-Orient non seulement pour sensibiliser aux impacts du changement climatique, mais également pour catalyser la collaboration régionale en matière de climat.

Elle ne doit pas non plus hésiter à s’attaquer à la question de l’abandon progressif des combustibles fossiles. Le dernier rapport d’évaluation du GIEC conclut que 47 % des émissions de CO2 liées à l’activité humaine sont dues au pétrole et au gaz. Le rapport de synthèse note que les émissions futures des infrastructures existantes de combustibles fossiles dépassent déjà le budget carbone restant pour limiter le réchauffement à 1,5 °C et met en doute la capacité des technologies émergentes, telles que le piégeage et le stockage du carbone, à réduire les niveaux de CO2.

Lors de la COP27, 80 nations ont appelé à l’abandon progressif des combustibles fossiles. Si ces demandes sont réitérées à Dubaï, elles devront être prises en compte dans la décision finale du sommet. Les hôtes de la COP pourraient utiliser leur pouvoir de rassemblement pour mener une coalition volontaire sur l’arrêt des nouvelles explorations pétrolières et gazières, conformément aux recommandations du GIEC et de l’Agence internationale de l’énergie.

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