Le pétrole libyen : une complication supplémentaire dans la bataille pour le contrôle de Tripoli

La violence a envahi les rues de la capitale libyenne, Tripoli, pour la troisième fois depuis le début de l’année. La résurgence des tensions entre les deux chefs d’un gouvernement sectionné – le gouvernement d’union nationale (GNU) basé à Tripoli et dirigé par Abdel Hamid Dbeibah, et le celui de Misrata, dirigé par le Premier ministre du gouvernement parallèle, Fathi Bashaga, s’est une fois de plus matérialisée à travers l’option militaire pour sortir d’une impasse institutionnelle qui dure depuis plus d’un an. 

Dans ce scénario, où il semble que la prise de la capitale soit désormais inévitable, il existe une autre question qui revêt une importance stratégique et un intérêt politique particuliers pour les deux parties : la production de pétrole.

La Libye fait partie de l’Organisation des pays exportateurs de pétrole (OPEP) qui, en raison de la poursuite de la guerre entre la Russie et l’Ukraine, subit actuellement des pressions internationales pour augmenter la production et les exportations quotidiennes de pétrole brut.

Cependant, l’approvisionnement pétrolier de la Libye semble ne tenir qu’à un cheveu. Bien que le pays ait produit en moyenne près de 1,3 million de barils de pétrole par jour (bpj) ces dernières années, les factions politiques en conflit ne semblent pas hésiter à se servir de la production pétrolière comme une arme contre leurs adversaires.

Depuis 2011 – date de la chute du gouvernement de Mouammar Kadhafi – les installations pétrolières sont devenues des cibles d’attaques et d’affrontements, et une monnaie d’échange dans un chantage politique entre des exécutifs rivaux qui n’aspirent qu’à franchir une nouvelle étape sur l’échiquier politique d’une guerre qui n’en finit pas. Cela concerne particulièrement le maréchal Khalifa Haftar, dont l’influence s’étend sur la plupart des zones où se situent les champs pétroliers et les ports de sortie. En ce sens, l’année 2020 a été témoin de l’un des blocages les plus importants de l’histoire du pays : pendant des mois, les forces militaires affiliées au camp de Haftar ont paralysé plusieurs installations et champs pétroliers.

Un événement similaire s’est produit en avril dernier, lorsque le ministre libyen du pétrole et du gaz, Mohamed Aoun, a déclaré que la fermeture des puits et le blocage des ports entraînaient des pertes pouvant atteindre 50 millions de dollars par jour. La production de pétrole a chuté d’environ 1,2 million de barils par jour à 500 000 barils par jour. Une baisse de plus de 50%. Depuis, les niveaux d’extraction et d’exportation ont connu un lent processus de récupération, comme le suggère une annonce faite en juillet par la société publique National Oil Corporation (NOC), lorsqu’elle a rapporté que la production quotidienne était de 860 000 millions de bpj.

Ces chiffres sont montés à 1,2 million de barils de pétrole par jour, depuis que la nomination d’un nouveau directeur de la NOC, favorable à Haftar, par le premier ministre de Tripoli, a permis la fin du blocus pétrolier. Mais la recrudescence du conflit dans la capitale met à nouveau en péril la stabilité du principal produit d’exportation libyen.

Plusieurs observateurs et analystes estiment que tant qu’une des deux factions ne parvient pas à prendre le contrôle du pays entier et de tous ses portefeuilles – y compris celui du pétrole – les combats ne s’arrêteront pas.

Cela est dû en grande partie au fait que les bénéfices obtenus grâce aux exportations de pétrole sont automatiquement versés à la Banque centrale de Libye en vertu d’accords internationaux établis, car pour faire pression sur le gouvernement de Tripoli, dirigé par Dbeibah, la stratégie de ses détracteurs consiste à interrompre directement la production. Et ces bénéfices eux-mêmes, font partie du “butin” qui sera contrôlé par la faction qui sortira victorieuse du conflit civil, politique et militaire qui enfonce le pays dans le chaos depuis 11 ans.

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