Le désaccord entre l’Egypte et Israël menace la paix à Gaza

Le Caire et Jérusalem sont en désaccord sur la trêve négociée par l’Égypte qui a mis fin aux affrontements qui ont ébranlé Gaza au début du mois. Le calme fragile qui règne à la frontière sud d’Israël dépend de cette trêve jonchée de dissensions et obtenue à la hâte.

Le chef du Shin Bet, Ronen Bar, a rencontré le chef des services de renseignement égyptiens, Abbas Kamel au Caire en début de semaine, afin de tenter de clarifier les termes de la trêve.

“Peut-être que quelque chose s’est perdu dans la traduction”, a supposé mercredi Ksenia Svetlova, l’ancienne membre de la Knesset.

« Les Égyptiens se sentent blessés. Ils ont l’impression d’avoir perdu la face », a déclaré Svetlova. « C’est quelque chose que vous ne voulez pas faire au Moyen-Orient. Ils ont fait une promesse qu’ils n’ont pas pu tenir et Israël ferait mieux de corriger cela rapidement. »

« À Gaza, nous ne pouvons compter que sur les Égyptiens pour négocier les accords de paix », a-t-elle ajouté.

Ksenia Svetlova est membre senior non-résident auprès de l’Atlantic Council et de l’Institut Mitvim pour la politique étrangère régionale.

Les relations entre Israël et l’Égypte ont connu une amélioration l’année dernière, suivie d’un renforcement des liens économiques, sécuritaires et touristiques. Toutefois, un certain nombre de désaccords ont subsisté avant même le déclenchement des derrières violences en date à Gaza.

Ofir Winter, chercheur à l’Institut d’études sur la sécurité nationale de Tel Aviv, a expliqué que les Égyptiens ont été embarrassés par plusieurs rapports parus dans les médias israéliens avant les violences du mois d’août.

Il s’agissait notamment d’un rapport publié en juin selon lequel des avions de chasse des FDI avaient abattu un drone égyptien non armé, qui avait pénétré dans l’espace aérien israélien. Le tir du drone était coordonné, mais l’Égypte aurait préféré que l’incident ne soit pas rendu public.

Les médias ont également rapporté au mois de juillet qu’un charnier de soldats égyptiens tués pendant la guerre des Six Jours avait été découvert près de Latrun en Israël.

« Par ailleurs, Israël n’a pas coordonné avec l’Égypte l’assassinat des commandants palestiniens du Jihad islamique Tayseer al-Jabari et Khaled Mansour à Gaza », a déclaré Ofir Winter.

« L’assassinat de Khaled Mansour a compliqué les efforts de l’Égypte pour négocier la trêve », a-t-il ajouté, rapportant qu’Israël avait déclaré que ces assassinats étaient indispensables pour prévenir de futures attaques terroristes.

Dans un briefing virtuel donné aux journalistes à travers le Media Central basé à Jérusalem, Ofir Winter a exposé les points de désaccord entre Israël et l’Égypte concernant la trêve.

« Israël a ignoré la demande du président égyptien Abdel Fattah al-Sissi, qui souhaitait que les FDI réduisent leurs raids en Cisjordanie contre les suspects et les terroristes palestiniens, afin que l’Égypte puisse stabiliser le cessez-le-feu », a déclaré M. Winter. « Au lieu de cela, les FDI ont poursuivi leurs opérations militaires en Cisjordanie. »

Ensuite, il y a eu l’arrestation du chef du Jihad islamique palestinien, Bassam al-Saadi, et celle de Khalil Awawda, qui a entamé une grève de la faim.

Dans le cadre de ses efforts pour obtenir une trêve, l’Égypte a affirmé au JIP qu’elle “travaillerait pour libérer les deux prisonniers”, a expliqué M. Winter. Cette promesse a permis au JIP d’accepter plus facilement un cessez-le-feu.

« Elle a été donné sans le consentement d’Israël. Cela a créé une ambiguïté sur le sort de ces prisonniers », a déclaré M. Winter, ajoutant que cela a conduit à des attentes différentes de la part des parties à la trêve, ce qui a contribué à creuser le fossé actuel entre Jérusalem et le Caire.

« L’Égypte s’est retrouvée sous la pression du JIP pour qu’elle tienne ses promesses », et le Caire fait maintenant pression sur Israël à ce sujet, a indiqué Ofir Winter.

Le chercheur s’est dit convaincu que le fait de négocier uniquement avec le JIP sans impliquer le Hamas, était une erreur. L’opération Breaking Dawn n’avait pas visé le Hamas, qui s’est imposé à la tête de la bande de Gaza depuis qu’il a évincé le Fatah en 2007, à l’issue d’un coup d’État sanglant.

Les précédentes guerres à Gaza ont opposé les FDI au Hamas. L’opération Breaking Dawn est l’une des rares manifestations de violence à n’avoir impliqué que le JIP.

« L’absence du Hamas en tant que partie à la trêve signifie qu’il n’a pas la responsabilité d’intervenir », a déclaré Ofir Winter.

« Maintenant, nous voyons que le JIP menace toujours de reprendre les hostilités si ses conditions ne sont pas remplies, alors que le Hamas est relativement libre de l’obligation de restreindre le JIP », a-t-il ajouté.

L’ancien ambassadeur israélien en Égypte, le Dr Haim Koren, a souligné que « al-Sissi est un acteur régional très important » ainsi qu’un « allié », et qu’il est très « dévoué à la médiation » entre Gaza et Israël.

« Les relations avec l’Égypte sous sa direction sont les meilleures que nous ayons jamais eues », a estimé Koren, maître de conférences à l’université Reichman et affilié à l’institut Mitvim.

Le président égyptien a été le négociateur principal de chaque trêve à Gaza depuis 2014. « Nous soulignons toujours le rôle de l’Égypte dans chaque négociation », a-t-il indiqué.

Lors des négociations passées, l’Égypte a organisé des médiations indirectes entre Israël et le Hamas, mais ces pourparlers différaient dans le fait qu’elles étaient organisées avec le JIP et avec l’implication du Qatar.

« Lorsque vous avez plus d’un médiateur, il peut y avoir des malentendus », a déclaré Koren.

Le désaccord n’a toutefois pas atteint le niveau d’une importante crise et devrait pouvoir être résolu. « Je pense que nous pouvons combler les lacunes. Il est dans l’intérêt de toutes les parties de le faire », a ajouté Haim Koren.

Source : The Jerusalem Post

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