A l’occasion du huitième anniversaire des manifestations qui ont secoué l’autorité turque, le président Erdogan a inauguré hier (vendredi) la première mosquée de la célèbre place Taksim à Istanbul.
Cette mosquée représente l’empreinte d’Erdogan sur la place Taksim, le quartier le plus célèbre de la capitale économique turque. Elle est l’aboutissement d’un rêve qu’il nourrit depuis 30 ans.
Après avoir effectué la prière du vendredi, le président turc a déclaré: “La mosquée Taksim occupe désormais une place de choix parmi les symboles d’Istanbul, et elle demeurera, si Dieu le veut, jusqu’à la fin des temps”.
L’ouverture a été accueillie avec beaucoup d’enthousiasme. La mosquée s’est rapidement remplie et plusieurs milliers de personnes ont prié dans sa cour extérieure.
“Il y a beaucoup de monde mais il n’y a pas assez de mosquées. Que Dieu bénisse ceux qui ont réussi cela”, a déclaré Abu Dharr Koc, un fidèle venu participer à la première prière avec un drapeau turc sur ses épaules.
Environ 4 000 personnes pourront prier à l’intérieur de la mosquée qui combine le style ottoman et contemporain.
Quand Erdogan est devenu maire d’Istanbul dans les années 1990, il a déploré l’absence de mosquée sur la place Taksim, notant au passage que le seul site religieux visible était une église orthodoxe située à quelques pas de là.
“Il n’y avait même pas de salle de prière”, a déclaré vendredi le président, “et les fidèles devaient prier sur des journaux posés par terre”.
Bien que la majorité de la population turque soit musulmane, la construction de cette mosquée qui a débuté en 2017 a suscité de nombreuse critiques. Certains ont accusé Erdogan de vouloir “islamiser” le pays et jeter l’ombre sur le fondateur de la république, Mustafa Kemal Atatürk.
L’imposante mosquée éclipse en effet le monument de la République qui représente des figures importantes de la guerre d’indépendance turque dont Mustafa Kemal Atatürk, et qui était une attraction majeure de la place Taksim.
Après avoir initialement annoncé l’ouverture de cette mosquée au cours du mois de Ramadan, Erdogan, connu pour choisir minutieusement ses dates, a décidé de l’inaugurer à l’occasion de l’anniversaire du début des grandes manifestations antigouvernementales de 2013 dont la place Taksim a été le centre.
La place a été le théâtre de manifestations protestataires connues sous le nom de “mouvement de Gezi” et a été témoin de la sévère répression de la police.
L’ouverture a eu lieu également un jour avant l’anniversaire de l’entrée des Ottomans à Constantinople en 1453, jour spécial pour le président qui se sent nostalgique des gloires du passé.
Lors de l’inauguration, Erdogan a déclaré qu’il considérait la mosquée Taksim comme un “cadeau pour célébrer le 568e anniversaire de la conquête d’Istanbul”.
Le président se targue souvent d’avoir transformé le pays grâce à la construction de nouveaux aéroports, d’hôpitaux, de routes et de grandes mosquées.
Une mosquée beaucoup plus vaste a été ouverte en 2019 au sommet de la colline de Çamlıca à Istanbul. Elle peut accueillir jusqu’à 60000 fidèles. Le bâtiment construit dans le style des sultans ottomans qui ont érigé des mosquées restées debout après leur mort, peut être aperçu de presque n’importe où dans la ville. Samedi, Erdogan y commémorera l’entrée des Ottomans à Constantinople.
La nouvelle mosquée fait partie du plan du président turc qui vise à satisfaire sa base électorale religieuse et conservatrice dans un contexte de difficultés économiques croissantes.
Les experts affirment que la reconversion de la basilique Sainte-Sophie en mosquée a également été décidée par Erdogan pour calmer ses électeurs, alors que les sondages d’opinion montrent que le soutien à son parti aux racines islamiques est en déclin. Hagia Sophia qui signifie “sagesse divine”, figure sur la liste du patrimoine mondial de l’UNESCO et était à l’origine la principale cathédrale de l’empire byzantin.
