La Turquie expulsera-t-elle les membres du Hamas pour plaire à Israël ?

À la lumière du rapprochement israélo-turc et de la volonté de Tel-Aviv et d’Ankara de renforcer leurs relations après une décennie de tension due au soutien de la Turquie au Hamas, le mouvement islamiste palestinien, ce dernier subit une pression croissante susceptible de pousser ses dirigeants basés en Turquie à envisager d’autres destinations comme le Qatar et l’Iran.

Le président turc, Recep Tayyip Erdogan, n’a pas laissé entendre qu’il avait l’intention de demander aux dirigeants du Hamas de quitter la Turquie, mais compte tenu des expériences antérieures, l’affaire pourrait se dérouler en coulisses, comme lorsque la Turquie avait ouvert la porte à la réconciliation avec l’Égypte, après avoir préalablement exercé des pressions sur les dirigeants de la Confrérie des Frères musulmans, qui ont fini par suspendre leurs activités en Turquie.

Avant l’annonce d’un plan destiné à réparer ses relations étrangères, notamment avec les pays arabes, Istanbul s’était transformée en plate-forme hostile à certains régimes arabes, avec lesquels Erdogan était en désaccord.

Le même sort pourrait être réservé au Hamas en échange d’un plus grand rapprochement avec Israël et de la sécurisation des intérêts du pays, notamment les intérêts liés aux gisements de gaz et de pétrole en Méditerranée orientale, et à la fin de l’isolement régional et international.

De son côté, le Hamas a déjà annoncé ses efforts pour rétablir les relations avec le régime syrien après une rupture d’environ 10 ans, lorsqu’il s’est rangé du côté de l’opposition soutenue par la Turquie, dont l’objectif était de renverser le président syrien Bachar al-Assad.

Pour Israël, le signe le plus éloquent de la bonne foi turque serait une rupture des relations entre Erdogan et le Hamas. La plus haute responsable de la diplomatie israélienne s’attendait à ce que la Turquie ferme le bureau du Hamas à Istanbul et peut-être même à ce qu’elle expulse ses dirigeants.

Irit Lillian, chargée d’affaires de l’ambassade d’Israël en Turquie, a déclaré vendredi que le processus de la reconduction d’un ambassadeur à Ankara pourrait avoir lieu d’ici quelques semaines, tout en réitérant les attentes d’Israël concernant la fermeture du bureau du Hamas à Istanbul.

Lors d’une réunion avec la presse, Irit Lillian a affirmé que la reconduction de l’ambassadeur est une question de “temps et non une question de confirmation ou de négation”. Elle a ajouté : “La seule raison d’un éventuel retard du côté israélien est les élections en Israël, mais j’espère que le déménagement aura lieu au moment opportun et que le processus sera terminé d’ici quelques semaines.” Des élections générales auront lieu en Israël le 1er novembre.

Plus tôt ce mois-ci, la Turquie et Israël ont convenu de reconduire leurs ambassadeurs plus de quatre ans après leur rappel, marquant une nouvelle étape dans le processus de l’évolution de leurs rapports, enclenché il y a déjà plusieurs mois.  

Les deux puissances régionales ont expulsé les ambassadeurs en 2018 après le meurtre de 60 Palestiniens par les forces israéliennes, lors de manifestations à la frontière de Gaza contre l’ouverture de l’ambassade américaine à Jérusalem. Cependant, avec la composante énergétique émergeant comme un domaine clé de coopération potentielle, les deux pays ont travaillé à réparer leurs relations de longue date.

Irit Lillian a mis en avant les défis auxquels sont confrontées les relations entre les deux Etats, affirmant que le plus grand obstacle à la tendance positive observée tout au long de l’année” est la présence du bureau du Hamas à Istanbul.

“Il y a de nombreux défis, mais de notre point de vue, l’un des principaux obstacles est le bureau du Hamas à Istanbul”, a-t-elle déclaré, ajoutant : “Le Hamas est une organisation terroriste et ce n’est un secret pour personne qu’Israël s’attend à ce que la Turquie ferme ce bureau et expulse+ les militants d’ici.”

La visite en Turquie du président israélien Isaac Herzog au mois de mars, suivie par les visites des deux ministres des Affaires étrangères, a contribué à réchauffer les relations après plus d’une décennie de tension.

Le président turc, Recep Tayyip Erdogan, et le Premier ministre israélien, Yair Lapid, ont partagé une conversation téléphonique au début du mois, au cours de laquelle ils ont exprimé leur satisfaction du progrès dans leurs relations et se sont mutuellement félicité de la décision de nommer les deux ambassadeurs.

Erdogan a déclaré que les mesures nécessaires pour nommer l’ambassadeur seraient prises dès que possible, tandis que Lapid a annoncé que le renforcement des relations se traduirait par des réalisations dans les domaines du commerce et du tourisme.

La Turquie a récemment reçu chaleureusement le président palestinien Mahmoud Abbas, confirmant sa précédente déclaration selon laquelle elle n’abandonnerait pas la cause palestinienne, mais la question du Hamas, l’opposant de Abbas, n’a pas été évoquée. Ankara a assuré que la normalisation de ses relations avec Israël servirait les droits des Palestiniens.

On s’attend à ce que la Turquie réduise son soutien au Hamas, que ce soit volontairement ou à la demande d’Israël, dans le cadre d’une nouvelle réorganisation des priorités du président turc, qui cherche des débouchés plus larges pour redresser la situation économique de son pays, et Israël est l’un de ces débouchés.

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