Turquie : l’inflation atteint les 70% et menace la popularité d’Erdogan

En Turquie, l’inflation a atteint près de 70% en un an, entrainant une importante détérioration de la qualité de vie des citoyens et réduisant les chances de réélection du président Recep Tayyip Erdogan en 2023.

La baisse de la taxe sur la valeur ajoutée des produits de première nécessité en début d’année n’ont pas eu les résultats escomptés. Durant le mois du Ramadan, les prix ont augmenté de 7,25%, portant l’inflation à 69,97%, le niveau le plus élevé depuis février 2002.

Les prix des produits alimentaires ont continué de grimper au cours des onze derniers mois, dépassant 61% sur l’année en raison de l’effondrement de la livre turque et de la hausse des prix de l’énergie.

Malgré les craintes d’une nouvelle hausse des prix due à la guerre entre l’Ukraine et la Russie, d’où la Turquie importe de l’énergie et des céréales, la Banque centrale turque n’a pas relevé ses taux d’intérêt fixés à 14% depuis fin 2021.

Contrairement aux théories économiques traditionnelles selon lesquelles les taux d’intérêt élevés stimulent l’inflation, le président Erdogan a obligé la Banque centrale à réduire le taux d’intérêt directeur de 19 % à 14 % entre septembre et décembre, une décision qui a conduit à l’effondrement de la lire.

Ainsi, la monnaie a connu un crash de 44% face au dollar en 2021, et a de nouveau perdu plus de 11% face au dollar depuis le 1er janvier.

A 15 mois des élections présidentielles prévues en juin 2023, l’inflation est au cœur des discussions en Turquie, et l’opposition accuse l’Office national des statistiques (TOIC) de sous-estimer intentionnellement le taux d’inflation.

Des économistes turcs indépendants du Groupe de recherche sur l’inflation (ENAG) ont déclaré aujourd’hui que l’inflation avait en réalité atteint 156,86 % sur une base annuelle, soit deux fois le taux officiel annoncé.

Malgré les sondages prédisant une élection compliquée, Erdogan espère encore être réélu en 2023, après deux décennies aux postes de Premier ministre puis de président.

Le président turc a promis en janvier dernier de réduire l’inflation “dès que possible”, et a confirmé la semaine dernière qu’elle “commencera à baisser après le mois de mai”.

Cette situation menace d’impacter la popularité du président, qui a bâti ses succès électoraux des 20 dernières années sur des promesses de prospérité.

La banque centrale a été contrainte la semaine dernière de relever ses prévisions d’inflation d’ici la fin de l’année, estimant qu’elle atteindra 42,8%, dépassant les 23,2% précédemment annoncés.

“L’affaire est devenue embarrassante pour la Turquie”, estime Timothy Ash, analyste au Bloast Management et spécialiste des affaires turques. “Bien sûr, il y a une hausse des prix de l’alimentation et de l’énergie, mais c’est aussi un fiasco de la politique monétaire turque.”

Jason Tuvey du Capital Economics basé à Londres, a déclaré que l’inflation continuera d’augmenter dans les mois à venir, et que “rien n’indique que la banque centrale turque est sur le point d’augmenter les taux d’intérêt”.

La Turquie connaît une inflation à deux chiffres depuis début 2017, mais elle n’a pas connu une telle hausse des prix des produits alimentaires depuis l’arrivée au pouvoir d’Erdogan fin 2002.

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