L’Europe craint le contrôle turc sur les routes migratoires en Libye

Les pays de l’Union européenne craignent que les bases navales que la Turquie cherche à établir en Libye ne se transforment en atout entre les mains des autorités turques qui pourraient influencer la politique d’immigration illégale en Méditerranée, et faire chanter les pays européens dans un contexte très conflictuel en eux et le régime tuc.

Le ministre des Affaires étrangères de l’Union européenne, Josep Borrell, a prévenu que la Turquie pourrait bien exercer son influence sur les routes migratoires depuis la Libye grâce à sa forte présence dans le pays, une crainte qui exacerbe les tensions entre Ankara et ses voisins européens qui se plaignent du fait que la Turquie ne respecte pas les obligations définies dans l’accord de migration signé en 2016.

“Pour le moment, la Turquie est très présente en Libye ou elle est devenue un acteur majeur”, a déclaré Josep Borrell jeudi dans un entretien avec le journal espagnol “El Pais”. Il a souligné que grâce aux “bases navales” qu’elle pourrait établir en Libye “face aux côtes italiennes”, la Turquie “aura un impact sur les routes migratoires en Méditerranée centrale, comme c’est déjà le cas en Méditerranée orientale”.

Pendant la guerre entre les forces rivales libyennes en 2019 et 2020 jusqu’au cessez-le-feu conclu en octobre, la Turquie a soutenu le gouvernement d’entente nationale (GNA) basé à Tripoli et reconnu par les Nations Unies, contre le maréchal Khalifa Haftar, soutenu par la Russie.

Le président turc Recep Tayyip Erdogan et le gouvernement d’entente nationale ont signé en novembre 2019 un accord de coopération militaire et un accord de délimitation des frontières maritimes qui permettent à la Turquie de faire valoir ses droits sur de larges zones de la Méditerranée orientale, riches en pétrole et en gaz.

Les relations entre la Turquie et l’Union européenne se sont fortement dégradées depuis 2016, notamment après une série d’opérations d’exploration gazières menées par Ankara dans les eaux grecques et chypriotes en Méditerranée orientale, ainsi qu’en raison de la présence de soldats turcs en Libye.

Le dossier des réfugiés était l’un des principaux points de discorde entre les pays européens et la Turquie qui a cherché à exploiter en 2016 les craintes européennes d’un afflux de réfugiés syriens à travers les côtes turques, pour obtenir lors des négociations avec Bruxelles des avantages politiques liés à l’adhésion de la Turquie à l’Union européenne et à la suppression des visas d’entrée en Europe pour les citoyens turcs, ainsi qu’au soutien financier apporté par les européens à la Turquie dans le cadre de l’accord de 2016, pour le faire passer de 3 milliards d’euros à 6 milliards d’euros, ce que l’Union européenne perçoit comme du chantage.

Le 18 mars 2016, la Turquie a signé avec l’Union européenne trois accords relatifs à la régulation du flux migratoires illégaux vers l’Europe, en échange de facilités et d’un soutien financier. Mais cinq ans après la signature de l’accord, les pays européens accusent la Turquie de laxisme dans l’application de des dispositions, notamment en réadmettant des réfugiés qui se trouvaient sur les îles grecques et dont les demandes d’asile ont été rejetées.

La Commission européenne a exprimé ses préoccupations au sujet du comportement de la Turquie, notant que les opérations d’expulsions prévues dans l’accord de 2016 ont été suspendues pendant 17 mois, et affirmant qu’elle “attache la plus haute importance à la mise en œuvre de l’accord avec toutes ses clauses”.

Le porte-parole de la Commission, Adalbert Yannis, a annoncé dans des déclarations publiées par les agences de presse européennes, que Bruxelles a mis en œuvre l’accord dans sa globalité, notamment en termes de transfert d’immigrants résidant sur le territoire turc vers les pays de l’Union européenne.

L’agence de presse italienne “Aki” a cité des sources européennes selon lesquelles malgré la prise de conscience européenne concernant la complexité de la coopération avec la Turquie, Bruxelles n’a pas l’intention d’abandonner l’accord de 2016, particulièrement en raison de la vaste influence turque en Libye, considéré comme l’un des plus importants pays de transit vers l’autre rive de la Méditerranée.

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