Ebrahim Rassi, “le candidat sans rival” tel que le décrit la presse iranienne réformiste a remporté hier, 19 juin, l’élection présidentielle iranienne avec 61,95 % du scrutin d’après Abdolfazl Rahmani Fazli, le ministère de l’intérieur.
Le taux de participation enregistré est de 48,8%, soit le plus faible depuis l’instauration de la République islamique en 1979.
L’ultraconservateur Raissi qui avait essuyé un échec en 2017 face au président sortant Hassan Rohani, est revenu sur la scène politique fort du soutien inconditionnel du guide suprême Ali Khamenei, qui l’a successivement placé à la tête des institutions les plus importantes de la hiérarchie, dont la direction de Astan Qods Razavi, la puissante fondation religieuse iranienne, située dans la ville de Mashhad d’où sont originaires Khamenei et Raissi.
Astan Qods Razavi fait fructifier des milliards d’euros de dons et possède un parc immobilier colossal, des terres agricoles et des entreprises opérant dans plusieurs domaines comme la construction et l’agroalimentaire. Ebrahim Raissi a dirigé cet empire économique durant 3 ans avant d’être nommé chef de l’autorité judiciaire en 2019. Il s’est ensuite employé à multiplier les procès pour corruption contre de hauts fonctionnaires de l’Etat et même contre des juges, profitant de l’occasion pour éliminer au passage des adversaires potentiels, comme son prédécesseur à la tête de l’organe judiciaire iranien, Sadeq Larijani, dont un des conseillers s’est retrouvé au milieu d’un scandale financier.
En plus d’être le bras droit du Guide suprême, Ebrahim Raissi est aussi le gendre de l’ayatollah Ahmad Alamolhoda, le représentant du Guide dans la province du Khorasan située dans le nord-est du pays.
Connu pour être un traditionaliste partisan de la ligne dure, Raissi est également un farouche opposant de l’Occident et non partisan de l’ouverture économique aux investisseurs étrangers. Les analystes craignent que son élection ne détériore davantage la situation financière et les relations économiques de l’Iran avec le reste du monde, notamment avec les grandes puissances.
Thierry Coville, économiste et spécialiste de l’Iran a déclaré : “L’Iran sous Ebrahim Raissi devrait continuer à investir dans les infrastructures, l’eau, l’électricité et la santé avec une économie dominée par les fondations qu’il connaît bien et les Gardiens de la révolution [qui possèdent eux aussi de nombreuses entreprises.]”
Concernant les négociations en cours autour de l’accord sur le programme nucléaire iranien, Thierry Coville pense que Raissi ne s’y opposerait pas ouvertement dans la mesure ou c’est “le Guide suprême qui donne le ton de ces négociations”.
Pour les organisations des droits de l’homme et les opposants iraniens, le nom de Raissi est synonyme d’un épisode sinistre de l’histoire de l’Iran. Le nouveau président iranien a été dans les 1980 l’un des bourreaux qui ont conduit des milliers de prisonniers politiques à l’échafaud.