24 heures après le meurtre du critique du gouvernement, Ihab al-Wazni, lors d’une attaque à Karbala (sud de l’Irak), une tentative d’assassinat a visé le journaliste irakien Ahmed Hassan à Al-Diwaniyah dans la nuit de dimanche à lundi 10 mai. Le journaliste de la chaine de télévision irakienne al-Furata été grièvement blessé selon des témoins et des sources médicales.
Un médecin a déclaré que Ahmed Hassan avait “été touché par deux balles dans la tête et une troisième dans l’épaule” et qu’il se trouvait aux soins intensifs. Selon l’AFP, un témoin oculaire qui était en compagnie du journaliste au moment des faits a affirmé que la tentative de meurtre avait eu lieu vers une heure du matin et que Hassan avait été abattu “alors qu’il sortait de sa voiture pour se rendre chez lui”.
La tentative d’assassiner Hassan a suivi de près le meurtre d’Ihab al-Wazni, le chef de la coordination des manifestations à Karbala, par des hommes armés qui l’ont abattu devant sa maison avec des armes silencieuses.
Al-Wazni était l’une des plus importantes voix irakiennes qui s’élevait contre la corruption et la mauvaise gestion de l’État et qui appellait à réduire l’influence de l’Iran et des groupes armés parmi les chiites dans la ville sainte.
L’assassinat d’al-Wazni a choqué les partisans de la “Révolution d’octobre”. Dimanche soir, des manifestants en colère se sont rassemblés devant le consulat iranien de Karbala, brûlant des pneus et mettant le feu à des cabines installées devant le bâtiment.
Aucune partie n’a revendiqué l’assassinat d’Ihab al-Wazni mais un activiste proche de lui s’est exprimé au bureau de médecine légale de Karbala en déclarant: “Ce sont les milices iraniennes. Ils ont assassiné Ihab et ils vont tous nous tuer. Ils nous menacent et le gouvernement se tait.”
En décembre 2019, al-Wazni avait échappé à une précédente tentative d’assassinat au cours de laquelle son compagnon, Fahim al-Tai, a été tué sous ses yeux.
Depuis le déclenchement des manifestations populaires irakiennes en octobre 2019, plus de 70 militants ont été victimes d’assassinat ou de tentative d’assassinat, tandis que des dizaines d’autres ont été kidnappés pendant de courtes périodes.
La police de Karbala a annoncé dimanche qu’elle n’épargnerait aucun effort pour retrouver les “terroristes” qui ont tué al-Wazni.
Le Premier ministre irakien Mustafa Al-Kazemi a déclaré dans un communiqué que “les assassins de l’activiste al-Wazni se faisaient des illusions s’ils pensaient pouvoir échapper à la justice”, ajoutant : “Nous allons poursuivre les tueurs et corrigerons chaque criminel qui s’est engagé à perturber la sécurité publique.”
La famille d’Ihab al-Wazni a annoncé qu’elle n’accepterait pas les condoléances pour sa mort tant que les auteurs de son meurtre ne seraient pas identifiés.
Les militants estiment que le gouvernement d’Al-Kazemi n’a pas rendu justice à leurs camarades assassinés un an après son entrée en fonction. Ali Al-Bayati, membre de la Commission gouvernementale des droits de l’homme, a de son côté accusé les autorités irakiennes de faiblesse et s’est demandé “quelles étaient réellement les mesures prises par al-Kazemi pour retrouver les auteurs de ces crimes.”
En février dernier, al-Wazni s’était adressé au Premier ministre sur sa page Facebook en lui disant: “Savez-vous ce qui se passe? Savez-vous qu’ils enlèvent et tuent, ou vivez-vous dans un autre pays que nous?”
Fin 2017, lorsque le gouvernorat de Karbala a voté un décret interdisant l’affichage de robes du soir et de sous-vêtements féminins sur les devantures des magasins, al-Wazni s’était publiquement opposé à tous ceux qui avaient exprimé cette idéologie extrémiste. “Ce genre de décisions religieuses ne diffèrent en rien de l’idéologie de Daech”, avait-il déclaré à l’époque.
En aout 2020, peut-être trop optimiste, il avait déclaré lors du cortège funèbre des “martyrs de la révolution d’octobre” à Karbala : “Tous les tyrans ont une fin, même si cela prend parfois beaucoup de temps.”
