Le spectre des Frères musulmans entrave le rapprochement diplomatique entre l’Egypte et la Turquie

Depuis le coup d’État militaire de 2013 qui a renversé l’ancien président égyptien Mohamed Morsi, Frère musulman proche allié du président turc Erdogan, les relations entre l’Egypte et la Turquie se sont considérablement refroidies.

De plus, le Caire a provoqué la colère d’Ankara en 2020 en signant avec la Grèce un accord bilatéral sur la délimitation des zones maritimes d’exploitation d’hydrocarbures en Méditerranée orientale.

Sous la pression de la nouvelle administration américaine, les deux pays alliés des Etats-Unis ont entamé des négociations préliminaires afin de normaliser leur relation et tenter un rapprochement.

Ces négociations préliminaires qui ont duré 2 jours, ont eu lieu au Caire plus tôt cette semaine entre les vice-ministres des Affaires étrangères. Les deux parties vont à présent en évaluer les résultats afin de déterminer les suites à donner, mais d’un côté comme de l’autre, la méfiance reste de mise.

Le soutien d’Ankara aux Frères musulmans d’Égypte évincés du pouvoir en 2013 par l’actuel président, Fattah al-Sissi, reste un point critique de tension entre les deux pays. Erdogan avait fermement soutenu Morsi et publiquement pleuré la chute des Frères musulmans en Egypte. Lors de rassemblements publics, le président turc continue d’exécuter avec sa main le signe de “rabia”, un geste symbolique utilisé par les Frères musulmans et les opposants d’al-Sissi, qui consiste à dresser les 4 doigts de la main tout en repliant le pouce à l’intérieur de la paume.

Pour apaiser le conflit, la Turquie a évoqué sa récente initiative d’accalmie avec la Grèce pour ce qui est de l’exploitation des énergies en méditerranée orientale.

Quant à l’asile des Frères musulmans en Turquie, Ankara a mis en avant les ordres qu’elle a donné à la Confrérie afin qu’elle atténue l’hostilité de ses discours contre l’Egypte sur ses chaînes de télé satellitaires émettant d’Istanbul. L’information a été confirmée par le ministre turc des Affaires étrangères, Mevlüt Çavuşoğlu, qui a déclaré : “il y a des opposants (à l’Egypte) auxquels nous avons envoyé les avertissements nécessaires, en particulier ceux qui exagèrent leur rhétorique extrémiste contre l’Egypte”.

Cependant, le dossier de la Libye représente toujours un grain de sable entravant une potentielle entente entre les deux pays, bien qu’ils se soient montrés plus ouverts à une solution politique à Tripoli depuis la nomination en mars dernier d’un nouveau Premier ministre libyen. L’Egypte exige le retrait de toutes les forces étrangères de Libye tandis que l’autorité turque s’emploie à retarder le départ de ses troupes militaires et des mercenaires syriens qu’elle y a envoyé.

Durant la récente guerre civile libyenne, l’Égypte et la Turquie ont soutenu les deux parties adverses et ont rivalisé d’influence au Soudan. Les analystes suggèrent que le rapprochement turco-égyptien pourrait apaiser les tensions régionales mais que les négociations diplomatiques à venir risquent de s’avérer difficiles.

En effet, il n’est pas garanti que les tentatives turques de conciliation à l’égard du Caire soient suffisantes pour assurer une percée diplomatique.

Selon certains analystes, l’initiative d’Ankara est une tentative de contrer son isolement croissant après avoir détérioré ses relations avec l’Egypte, Israël, l’Arabie saoudite et les Emirats Arabes Unis. Hussein Badji, un analyste turc a affirmé : “La Turquie avait l’intention de devenir le leader et l’acteur principal de la région . A présent, seul le Qatar soutient la Turquie, et cela ne suffit pas.”

“En fin de compte, l’efficacité et les résultats de cette nouvelle métamorphose dépendent des actions de la Turquie”, a déclaré Sinan Ulgen, directeur de l’Institut de recherche EDAM basé à Istanbul.

Les experts soutiennent que le rapprochement avec l’Egypte coutera de douloureuses concessions à Erdogan qui ne pourra plus défendre les Frères musulmans comme avant.

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