Washington recule devant l’Iran et se distancie des dossiers du Moyen-Orient

On peut dire que les “réalisations” de la nouvelle administration américaine au Moyen-Orient au cours des 100 premiers jours du mandat de Joe Biden ne reflètent pas vraiment les discours de sa campagne électorale. Il semble que la région ne soit plus une priorité pour les démocrates, bien qu’elle ne l’était déjà pas pour les républicains, hormis en ce qui concerne les relations arabo-israéliennes. Actuellement, le retour à l’accord nucléaire de 2015 reste la principale problématique que Joe Biden voudrait résoudre avant de se consacrer à la montée en puissance de la Chine et aux questions relatives à la Russie.

Peu de temps après la prise de fonction de Biden, le secrétaire d’État Anthony Blinken a annoncé que le retour à l’accord sur le programme nucléaire iranien et la levée des sanctions sur l’Iran dépendaient du retour de l’Iran au respect de ses obligations. Il a évoqué la nécessité d’une coordination entre les pays de la région, en particulier avec Israël, pour combler les lacunes de l’accord de 2015. Aujourd’hui, malgré les assurances de Washington envers Tel Aviv, les réunions stratégiques entre les deux pays et la visite du secrétaire américain à la Défense Lloyd Austin, l’administration Biden révèle un abandon progressif des conditions qu’elle impose à l’Iran. En effet, au cours des 100 premiers jours de son mandat, l’Iran a augmenté le taux d’enrichissement de l’uranium deux fois d’environ 4% à 20%, puis l’a porté à 60% après l’attaque de l’installation nucléaire de Natanz. Il a également exploité des centrifugeuses plus sophistiquées, ce qu’il n’a pas fait au cours des 3 années qui ont suivi le retrait de Donald Trump de l’accord.

Alors que la région retient son souffle en attendant les avancées des réunions de Vienne, toutes les informations indiquent que Washington et Téhéran sont en passe de revenir simultanément à cet accord dans les prochaines semaines, après la progression du négociateur en chef américain, Bob Mali, dans la rédaction d’un projet de levée des sanctions.

Concernant le dossier du Moyen-Orient, l’administration Biden a annoncé son adhésion aux “Accords d’Abraham”, deux traités conclus par l’administration Trump, et a maintenu ses décisions politiques, notamment la question de la reconnaissance de Jérusalem comme capitale d’Israël et le transfert de l’ambassade américaine de Tel Aviv vers Jérusalem. Il apparait que l’administration cherche à transformer la question du conflit israélo-palestinien en “question humanitaire”, malgré le renouvellement par Blinken du slogan de la “solution à deux États”. Jusqu’à présent, il n’a pris aucun contact avec l’Autorité palestinienne et n’a pas annoncé de date pour la réouverture de l’ambassade palestinienne à Washington, fermée par Trump. Ses principales “réalisations” ont été la promesse de fournir à nouveau à l’Autorité palestinienne une une aide de secours et de travaux des Nations unies pour les réfugiés de Palestine dans le Proche-Orient (l’UNRWA), et une demande adressée aux Israéliens pour débloquer partiellement les fonds de l’Autorité pour contribuer à faire face à la pandémie du Coronavirus.

La question de la crise syrienne est toujours en suspens. Malgré la terrible détérioration des conditions politiques et de vie, aucun responsable majeur n’a été nommé. L’administration Biden a réitéré sa condamnation du régime du président Bashar al-Assad considéré comme illégal, et l’affirmation que les prochaines élections présidentielles ne seront ni libres, ni équitables, ni crédibles. Elle a également réitéré son adhésion à la “loi César”, soulignant qu’elle n’empêcherait pas l’aide humanitaire d’atteindre la Syrie, appelant à faciliter l’acheminement de l’aide en renouvelant la résolution du Conseil de sécurité de l’ONU sur les passages des frontières.

Malgré la récente visite au Liban du sous-secrétaire d’État, David Hale, il en va de même pour la crise libanaise. Le traitement de l’effondrement imminent de ce pays attend toujours un accord avec l’Iran.

Concernant le Yémen, le classement du groupe yéménite pro-iranien Houthi comme entité terroriste par l’administration Biden a représenté une nouvelle entrave à une entente avec l’Iran, malgré les initiatives de l’Arabie saoudite et des pays du Golfe pour fournir un terrain approprié pour une solution au Yémen.

L’initiative la plus importante a peut-être été réalisée en Libye, où Washington a soutenu un consensus international et régional qui a abouti à une nouvelle autorité pour parrainer une solution politique imposée par plusieurs facteurs, dont la nécessité d’arrêter les convois de migrants vers l’Europe, et une tentative de dissimuler le désaccord entre la Turquie et certains pays européens membres de l’OTAN.

En outre, la série de pourparlers stratégiques qui a eu lieu avec l’Irak a abouti au renouvellement par Joe Biden de son adhésion à la poursuite de la lutte contre “l’Etat islamique” et au rejet de la pression exercée par les milices soutenues par l’Iran pour forcer le retrait des troupes américaines, encore déployées dans un certain nombre de bases militaires et autour de l’ambassade américaine à Bagdad. Mais il est encore incapable d’imposer un arrêt des attaques des milices, qui ont évité jusqu’à présent, le ciblage direct des forces américaines, comme l’a confirmé le général du Corps des Marines des États-Unis, Kenneth McKenzie, lors d’une audition devant le Congrès la semaine dernière

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