Commémoration du génocide arménien : La diaspora en colère se sent menacée en France

Aujourd’hui, comme chaque année, la communauté arménienne de France est sortie en masse à Paris, Lyon et Marseille, pour commémorer le 106e anniversaire du génocide arménien de 1915-1918, durant lequel 1.5 million de personnes ont été tuées par l’Empire Ottoman.

La foule s’est rassemblée dans le 18e arrondissement de Paris près de la statut du compositeur arménien Komitas et s’est dirigée vers l’ambassade turque en scandant des slogans tels que “le génocide continue” et “Erdogan assassin”. Certains ont porté des photographies de héros de la résistance, d’autres des pancartes représentant Erdogan avec des traits diaboliques et sur lesquelles on peut “Hitlerdogan”.

Fait tout a fait inédit, les arméniens ont également exprimé un sentiment nouveau d’insécurité dû aux violences dont ils sont la cible en France, commises par des groupes d’ultra-nationalistes turcs. Des centaines de sympathisants du groupe turc d’extrême droite “Les Loups Gris”, un mouvement interdit en France depuis 2020, avaient défilé dans les rues pendant la guerre au Haut Karabakh pour appeler à la “mise à mort” des arméniens.

“On se serait cru en Allemagne dans les années 1930… Ils n’auraient jamais osé faire ça il y a dix ans”, a témoigné Sevag, un jeune arménien. “Erdogan leur a donné confiance. Il les finance, l’ambassade turque ici, c’est son arrière-cour” a t-il ajouté.

En 2017, le pasteur Gilbert Leonian a vu son église d’Alfortville en région parisienne se faire incendier à l’aube, quelques heures avant le service du dimanche. Une poubelle remplie d’essence a été projetée contre la porte principale de l’église avant de prendre feu.

“J’ai pensé que l’église et les escaliers étaient en train de brûler et que nous allions mourir”, témoigne le pasteur Leonian. Fort heureusement, plus de peur que de mal. La porte de l’église a été dégradée mais personne n’a été blessé.
Au cours de la même semaine, l’église du père Leonian a de nouveau été ciblée, quelques jours après la visite d’un pasteur irakien. La communauté arménienne dénoncent aujourd’hui des agressions de plus en plus fréquentes.

“Que les tentacules de la Turquie parviennent à s’étendre jusqu’en France, c’est comme si la campagne de haine contre les Arméniens n’avait jamais cessé” a lancé Sabrina Davidian, une manifestante arménienne de 39 ans.

Malgré leur colère, certains manifestants ont tenu à mettre en évidence le pacifisme du peuple arménien. Ian Manook, un écrivain de 71 ans dont le dernier roman relate l’histoire de sa grand-mère vendue aux turcs comme esclave à âge de 10 ans a déclaré : “J’ai rien contre le peuple Turc, rien.” “On partage la même cuisine, la même musique, presque la même danse, j’en veux à l’État… et à Erdogan qui joue avec le feu”.

Le génocide arménien a officiellement été reconnu en France en 2001. En 2019, le président français Emmanuel Macron a décrété le 24 avril, jour du début des massacres, “jour de commémoration nationale”. Il a également été le seul dirigeant en occident à affirmer que le conflit du Haut Karabakh a été provoqué par l’Azerbaïdjan, et à accuser la Turquie d’avoir envoyé 2 000 mercenaires syriens pour prendre part aux combats. Malheureusement, face à la puissance de la Turquie, Macron s’est finalement abstenu de prendre partie, ce que la diaspora arménienne lui reproche.

“Intellectuellement, la France est à cent pour cent avec nous, a déclaré Sevag, mais maintenant il y a des liaisons économiques avec la Turquie. Soit c’est le pays des droits de l’Homme, soit c’est le pays de l’argent.”

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