Malgré l’abolition du système de la “kafala” en 2020 au Qatar, les conditions de travail des ouvriers immigrés sur les colossaux chantiers de la prochaine Coupe du monde de football n’en sont pas moins déplorables. Depuis le lancement des chantiers en 2010, 6500 ouvriers ont trouvé la mort sur leur lieu de travail, selon une publication du quotidien britannique Guardian du 23 février 2021, basée sur des données recueillies auprès des autorités du Népal, du Sri Lanka, de l’Inde, du Pakistan et du Bangladesh. Le Guardian précise que ces chiffres sont encore sous-estimés car le total n’inclut pas les travailleurs kenyans et philippins, les ambassades des deux pays exportateurs de main d’œuvre au Qatar n’ayant pas répondu à sa sollicitation.
Les clubs de football européens appellent au boycott de la Coupe du monde 2022
Toutefois, les informations révélées par le journal ont suscité la révolte et ont été à l’origine de la multiplication des appels pour dénoncer les violations des droits de l’homme du régime qatari, en boycottant la compétition sportive de 2022. Le club norvégien de Tromsø a publié le communiqué suivant : “Le fait que la corruption, l’esclavage moderne et un nombre élevé de travailleurs morts soient à la base de la chose la plus importante que nous ayons, la Coupe du Monde, n’est pas du tout acceptable. Nous ne pouvons plus nous asseoir et regarder des gens mourir au nom du football”. “La critique et le dialogue n’ont pas abouti. Nous pensons qu’il est temps de passer à l’étape suivante : le boycott.” a conclu le club. L’appel au boycott a été relayé par les clubs du Viking FK, de Rosenborg, de Strømsgodset, de Brann et de Vålerenga.
Au Danemark, la boycott pourrait être débattu devant le Parlement local si la pétition lancée en décembre dernier par des supporters de grands clubs danois atteint 50 000 signatures d’ici juin. Elle en avait récolté 6814 au 4 mars 2021. Le sélectionneur danois Kasper Hjulmand a apporté son soutien en faisant part de son intention de respecter la volonté de ceux parmi ses joueurs qui refuseraient de participer à la Coupe du monde en cas de qualification.
Le soutien indispensable des grandes nations du football
Malgré son adhésion au principe, Terje Svendsen, le président de la Fédération norvégienne de football, a déclaré : “Nous pensons que cela n’aide personne si la petite Norvège boycotte de son côté”. En effet, le boycott n’aurait de sens que si les grandes nations du football comme le Brésil, l’Allemagne ou la France, rejoignent le mouvement. Or ,ces pays ne se sont pas fait entendre à ce sujet.
Certains grands noms du football comme les français Kylian Mbappé et Antoine Griezmann sont très “engagés”, leur intervention pèserait lourd dans la balance. Dans une interview accordée à France 24 par Nicolas Kssis-Martov, journaliste à So Foot, ce dernier a résumé la situation ainsi : “Boycotter une Coupe du monde c’est un niveau supplémentaire. C’est un moment extrêmement important pour un footballeur qui ne se produit que deux ou trois fois dans une carrière. Dire ‘je ne m’y rendrai pas pour des raisons éthiques et morales’ serait extrêmement particulier. Mais cela s’imposerait”, juge Nicolas Kssis-Martov, au micro de France 24. “La question du boycott s’est déjà posée sur d’autres compétitions au Brésil, en Chine, en Russie pour des raisons de respect des droits de l’Homme mais là il s’agit de vies humaines. Est-ce que les joueurs ont envie de jouer dans un cimetière ?”
Le Qatar de son côté conteste ces chiffres et refuse de reconnaitre sa responsabilité dans la mort de tous ces ouvriers. D’après les chiffres officiels au Qatar, depuis décembre 2010, seulement 37 migrants ont trouvé la mort sur les chantiers qui les emploient. Les autres décès sont attribués à des “causes naturelles” par les responsables qataris qui clament que “le taux de mortalité au sein de ces communautés se situe dans la fourchette prévue pour la taille et la démographie de la population”.
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