2021 : Erdogan sur le fil du rasoir

Déception de son électorat, confiance perdue de ses alliés traditionnels, Recep Tayyip Erdogan semble impuissant face à sa chute de popularité. En interne comme sur la scène internationale, 2021 s’annonce critique pour le président turc. En dépit du succès de ses drones télépilotés “made in Turkey” envoyés en renfort en Syrie, Lybie et dans le Haut-Karabakh, le nouveau chef militaire en disgrâce semble de plus en plus isolé suite à une série de décisions l’ayant desservi. L’achat du système de missiles antiaériens S-400 à la Russie, pays ennemi de l’OTAN, lui a valu des sanctions du Congrès américain. L’Union Européenne menace à son tour de représailles si les opérations turques en méditerranée orientale devaient se poursuivre.

En décembre 2020, Mike Pompeo, le secrétaire d’état américain sur le point de quitter ses fonctions à la fin du mandat de Donald Trump, a enjoint Erdogan de “revenir à un comportement d’allié” et a reproché à la Turquie via le ministre turque des affaires étrangères Mevlüt Çavusoglu, d’avoir envoyé des mercenaires en Syrie, en Lybie et dans le Haut-Karabakh. Le géo-politologue Jean Sylvestre Mongrenier qualifie le nouveau tournant stratégique de la Turquie de tentative de positionnement en “puissance révisionniste”.

A Bruxelles comme à Washington, les alliés appellent à moins d’indulgence envers les écarts du président turque. En effet, jusque là, seul Emmanuel Macron avait osé dénoncer les agissements de Recep Erdogan en évoquant “la mort cérébrale de l’Otan” dans The Economist. Mais depuis la décision de la Turquie en octobre de tester les batteries des missiles russes antiaériens s-400, les américains sont également montés au créneau.

Des changements sont attendus avec l’arrivée de Joe Biden. Le nouveau président des Etats-Unis moins accommodant que Donald Trump risque de mettre en œuvre des sanctions qui porteraient un grand préjudice à l’industrie de défense turque, encore dépendante de la technologie américaine, notamment en ce qui concerne les moteurs des futurs engins des grands projets militaires nationaux tels que l’avion de combat TF-X, l’avion d’entraînement Hurjet l’hélicoptère d’attaque T-129.

La seule option laissée à Erdogan pour éviter ces sanctions qui s’avèreraient très compromettantes pour son industrie de l’armement, est de renoncer à l’activation des antimissiles russes S-400. Cette issue, loin de plaire au président turc, pourrait néanmoins représenter un point de départ pour ouvrir les négociations avec l’administration Biden en vue d’un éventuel compromis entre les Etats-Unis et la Turquie, bien que la versatilité et l’imprévisibilité d’Erdogan en fait douter plus d’un. A ce stade tous les scénarios sont envisageables.

En interne, avec des investissements étrangers en berne, un pouvoir d’achat ayant baissé de plus de 40% au cours de ces dernières années, une chute drastique dans les sondages, à 2 ans des élections présidentielles et législatives, il est plus qu’évident que le président Erdogan n’a plus le vent en poupe.

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