L’impact des décisions de l’OPEP+ sur l’inflation et le prix du pétrole

Dirigés par l’Arabie saoudite et la Russie, les principaux membres de l’Organisation des pays exportateurs de pétrole (OPEP+) ont décidé de réduire la quantité de pétrole qu’ils fournissent à l’économie mondiale à partir de ce mois de novembre.

Selon la loi de l’offre et de la demande, cela ne peut qu’entrainer une hausse des prix du pétrole brut, du carburant diesel, de l’essence et du mazout de chauffage produit à partir du pétrole.

La décision de l’OPEP+ de réduire sa production de 2 millions de barils par jour a été prise au moment ou les alliés occidentaux tentent de limiter les revenus pétroliers russes, grâce auxquels Moscou pourrait soutenir sa guerre contre l’Ukraine.

Voici quelques éléments expliquant la décision de l’OPEP+ et les effets qu’elle pourrait entrainer sur l’économie et le plafond des prix du pétrole :

Pourquoi l’OPEP+ a-t-elle décidé de réduire la production ?

Le ministre saoudien de l’Énergie, Abdulaziz ben Salman, a expliqué que l’organisation travaillait de manière proactive pour ajuster l’offre avant une éventuelle baisse de la demande, car le ralentissement de l’économie mondiale a réduit les besoins des industries en carburant.

“Nous traversons une période d’incertitudes multiples qui pourraient se présenter à nous, c’est un nuage qui se prépare”, a-t-il déclaré, ajoutant que l’OPEP+ cherche à garder “une longueur d’avance”. Il a décrit le groupe comme étant « une force de modération pour atteindre la stabilité ».

Le prix du pétrole a chuté après une reprise estivale. Le cours du Brent a enregistré une baisse de 24% par rapport à la mi-juin, lorsque le baril valait 123 dollars. Il est actuellement à 93,50 $.

L’une des principales raisons de ce glissement est la crainte qu’une grande partie de l’économie mondiale ne se dirige vers la récession alors que les prix élevés de l’énergie – le pétrole, le gaz naturel et l’électricité – stimulent l’inflation et baissent pouvoir d’achat des consommateurs.

Aussi, les gains de l’été sont dus à la crainte qu’une grande partie de la production pétrolière russe ne soit perdue pour le marché en raison de la guerre en Ukraine.

Étant donné que les professionnels occidentaux du négoce ont évité le pétrole russe même sans les sanctions, les clients indiens et chinois ont acheté ces barils en bénéficiant d’une très importante remise, de sorte que l’approvisionnement n’a pas été aussi mauvais que prévu.

Les producteurs de pétrole s’inquiètent d’un effondrement brusque des prix si l’économie mondiale décline plus rapidement que prévu. C’est ce qui s’est produit lors de la pandémie du coronavirus en 2020 et de la crise économique mondiale de 2008-2009.

Comment l’Occident cible-t-il le pétrole russe ?

L’embargo a été imposé par les États-Unis et la Grande-Bretagne, ce qui représente surtout un geste symbolique dans la mesure ou aucun des deux pays n’importait beaucoup de pétrole russe. Washington a cessé de faire pression sur l’Union européenne pour imposer une interdiction d’importation car 25% des besoins européens en pétrole sont importés de Russie.

Finalement, le bloc des 27 a décidé de couper le pétrole russe qui arrive par bateau le 5 décembre, tout en conservant une petite quantité d’approvisionnements par pipeline dont dépendent certains pays d’Europe de l’Est.

En outre, les États-Unis et d’autres grandes démocraties du Groupe des Sept s’emploient à élaborer des stratégies autour su plafonnement des prix du pétrole russe, notamment en ciblant les assureurs et autres prestataires qui facilitent les expéditions pétrolières de la Russie vers d’autres pays. L’Union européenne a validé cette semaine une mesure dans ce sens.

Ces prestataires sont nombreux en Europe et il leur sera interdit de traiter avec le pétrole russe si le prix dépasse le plafond.

Comment les réductions pétrolières, les prix plafonds et l’embargo vont-ils s’affronter ?

L’idée derrière le plafonnement des prix est de maintenir, uniquement à bas prix, l’acheminement du pétrole russe vers le marché mondial. Toutefois, la Russie a menacé d’arrêter les livraisons vers les pays dont les entreprises adhèrent au plafond, dans l’espoir de retirer plus de pétrole russe du marché et de faire grimper les prix.

Cela pourrait également entraîner une hausse des prix du carburant à la pompe.

Aux États-Unis, le prix de l’essence a récemment chuté après avoir atteint le niveau record de 5,02 dollars le gallon vers mi-juin, mais il a de nouveau augmenté, causant des problématiques d’ordre politique au président Joe Biden à la veille élections américaines de mi-mandat.

Confronté à la plus importante inflation depuis 40 ans, Joe Biden a salué la chute des prix à la pompe. Au cours de la semaine dernière, le prix national moyen par gallon a augmenté de 9 cents pour atteindre 3,87 $, soit 65 cents de plus que ce que les Américains payaient il y a un an.

“C’est décevant, et nous examinons les alternatives que nous pourrions avoir”, a déclaré le président américain à la presse à propos de la décision de l’OPEP+.

Les réductions de la production de l’OPEP exacerberont-elles l’inflation ?

Très probablement. Le Brent devrait atteindre 100 dollars le baril d’ici décembre. C’est plus élevé que la précédente prévision de 89 $.

Une partie de la réduction de 2 millions de barils par jour n’est pas vraiment concrète, car certains pays de l’OPEP+ ne parviennent déjà pas à produire leur quota. Ainsi, le groupe ne peut livrer qu’environ 1,2 million de barils par jour en réductions réelles.

Cela aura toujours un effet “significatif” sur les prix

La hausse du prix du pétrole aggravera inévitablement l’inflation à laquelle les banques centrales mondiales sont confrontées, et déclenchera des taux d’intérêt plus élevés pour refroidir l’économie.

Cela aggravera également la crise énergétique en Europe, largement due aux coupures russes dans l’approvisionnement en gaz naturel utilisé pour le chauffage, l’électricité et dans les usines, et entraînera une hausse des prix de l’essence dans le monde. Comme cela alimente l’inflation, les gens auront moins d’argent pour faire face à d’autres postes de dépenses comme la nourriture et le loyer.

D’autres facteurs pourraient également affecter les prix du pétrole, notamment la récession potentielle aux États-Unis ou en Europe et la durée des mesures de la Chine contre le coronavirus, qui ont réduit la demande en carburant.

Qu’est-ce que cela implique pour la Russie ?

La Russie, le plus grand producteur hors OPEP, bénéficiera de la hausse des prix du pétrole avant qu’un plafond ne soit fixé. Si la Russie doit vendre du pétrole à prix réduit, au moins la réduction commence à un niveau de prix plus élevé.

La hausse des prix du pétrole plus tôt cette année a compensé une grande partie des pertes de la Russie causées par les acheteurs occidentaux qui ont évité ses approvisionnements. Le pays a également été en mesure de rediriger environ les deux tiers de ses ventes occidentales vers d’autres clients comme l’Inde.

Mais ensuite, Moscou a vu sa prise de contrôle du pétrole chuter de 21 milliards de dollars en juin à 19 milliards de dollars en juillet, puis à 17,7 milliards de dollars en août, alors que les prix et le volume des ventes ont chuté, selon l’Agence internationale de l’énergie. Un tiers du budget de l’État russe provient des revenus générés par le pétrole et le gaz, de sorte qu’un plafonnement des prix érodera davantage une source majeure de revenus.

Pendant ce temps, le reste de l’économie russe se contracte en raison des sanctions imposées à Moscou et du retrait des entreprises et des investisseurs étrangers.  

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